Bruno Lafont, NFL Biosciences

22 avril 2024

Un médicament botanique pour lutter contre les addictions

Développer des médicaments botaniques pour le traitement des dépendances et addictions (tabac, cannabis, alcool) : c’est le cœur d’activité de la société biopharmaceutique NFL Biosciences (Castelnau-le-Lez, 34), cotée sur Euronext Growth Paris. Pour passer à la phase industrielle, NFL Biosciences lève 3 M€ mi-avril. Bruno Lafont, directeur général délégué et cofondateur, nous en dit plus. « Trois questions à… », la rubrique où le tutoiement est de rigueur.  

Bruno, peux-tu décrire l’innovation développée par NFL Biosciences ?
Nous ambitionnons d’apporter de nouvelles solutions thérapeutiques, naturelles, plus sûres et plus efficaces, pour le traitement des addictions. Notre produit le plus avancé, le NFL-101, est un extrait de feuilles de tabac standardisé et dépourvu de nicotine, protégé par deux familles de brevets. Nous développons aussi NFL-301, un candidat médicament naturel pour la réduction de la consommation d’alcool, et avons un projet de développement de médicament pour le traitement des troubles de l’usage du cannabis. Notre société, qui compte 5 salariés, est qualifiée « Entreprise Innovante », éligible à l’investissement des FCPI. Je pilote le développement de produits, et, de son côté, Ignacio Faus, PDG, assure la stratégie de financement et de partenariats.  

Quel est le but de la levée de fonds, et auprès de qui les fonds sont-ils levés ? 
20 % des 3 M€ sont levés auprès du grand public, et 80 % (2,4 M€) sont levés auprès d’une quinzaine de fonds, pour moitié français et pour moitié internationaux. Ces petites participations garantissent une liquidité du capital et une indépendance de la société.  
Le but de l’opération est de financer la mise en place d’une chaîne de fabrication, pour produire des lots cliniques de phase 3, en vue de la commercialisation future du médicament. Notre objectif est de produire des millions de doses par an. NFL Biosciences passe d’une étape scientifique à une étape industrielle. Nous venons d’ailleurs de recruter Lara Babich au poste de responsable du développement et de la fabrication. Diplômée d’un master en biotechnologie industrielle de l’Université de Padova (Italie), puis d’un doctorat en chimie bio-organique à l’Université d’Amsterdam, elle affiche plus de 10 ans d’expérience dans le développement de candidats médicaments en phases cliniques et précommerciales.  
La fabrication des doses sera multi-sites : la matière première (la feuille de tabac) est cultivée près de Clermont-Ferrand (63). Puis, cette matière première est broyée et transformée en extrait liquide. Les doses seront ensuite conditionnées en milieu stérile dans des flacons, et enfin lyophilisées avant d’être vendues sous forme de kit. L’administration sera faite par injection sous-cutanée, à la manière d’un vaccin, par un médecin. La commercialisation sera opérée par des groupes pharmaceutiques, nous espérons dans deux ans.

Quel est ton business-model, et quelle est la marque différenciante de NFL Biosciences par rapport à ses concurrents ?
L’argent sera gagné de trois façons : revenus touchés lors de la signature de contrats ; marge industrielle lors de la fabrication ; royalties perçues sur les ventes de notre partenaire commercial. Ce qui offre de belles perspectives, de plusieurs dizaines de millions d’euros de revenus annuels à terme.  
La force de notre produit, c’est son efficacité, et le fait qu’une seule administration de dose suffise pour restaurer durablement l’activité cérébrale du patient, en modifiant l’activité neuronale. C’est complètement nouveau. La région du thalamus, sous-activée en période de sevrage, est réactivée par notre produit. Les produits concurrents nécessitent plusieurs prises pour essayer de se désaccoutumer. Même sur des fumeurs ne souhaitant pas s’arrêter, le NFL-101 génère une réduction significative de l’envie de fumer, avec des résultats supérieurs à notre concurrent Champix. Nous attendons pour début juillet les résultats d’une étude clinique réalisée dans 9 CHU français, sur 318 fumeurs. Le critère principal est l’abstinence continue, validée par des biomarqueurs, à partir du 15e jour, pendant quatre semaines. Si cette efficacité est confirmée par cette étude clinique, cela signifiera que l’on a développé un produit extraordinaire dans la lutte contre l’addiction au tabac !  
NFL Biosciences porte deux autres projets de candidat-médicament, l’un dans le sevrage de cannabis, avec un extrait protéique du cannabis, et l’autre pour la réduction de consommation excessive d’alcool. Nous attendons un retour de la FDA (Food and Drug Administration) américaine dans les prochaines semaines. L’idée est de réduire la consommation excessive d’alcool des patients dépendants du « binge drinking » (ou API, alcoolisation ponctuelle importante, plus de 6 verres consommés lors d’une soirée), sans altérer leur plaisir. Concrètement, le patient pourra ressentir les mêmes sensations, mais en buvant 4 bières au lieu de 10. La recherche est menée en partenariat avec Athéna Pharmaceutiques en relation avec les chercheurs de l’Université de Harvard.  

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