Libérez les entreprises !

27 février 2025
Loic Douyere - Les indiscretions
Loïc Douyère, directeur associé de Florian Mantione Institut RH ©DR

C’est une apparente contradiction : le taux de chômage est en baisse, à 7,3 % de la population active au 4e trimestre 2024 au niveau national, d’après l’Insee, alors que le nombre d’inscrits à France Travail augmente franchement, de plus de 100.000 sur l’année.
Ce paradoxe a une explication simple. La France a tellement normé et légiféré que le coût du travail est trop élevé pour les entreprises françaises, et qu’une partie des collaborateurs potentiels ne s’inscrit pas dans une recherche active. 

L’intervention du patron de Michelin, Florent Menegaux, lors de son audition au Sénat le 22 janvier, m’a à ce titre marqué. On parle d’une multinationale qui cultive historiquement la discrétion, depuis son siège social de Clermont-Ferrand. Aussi, sa prise de position, très claire, sonne comme une alerte. « Ce n’est plus tenable », a-t-il lancé devant les sénateurs, à propos du coût du travail en France, alors qu’il était amené à justifier l’annonce, fin 2024, de la fermeture de deux usines du géant mondial du pneu à Cholet et Vannes, employant 1.250 salariés. En clair, le patron de Michelin a asséné à la représentation nationale : « Votre système est antiéconomique, il m’empêche de faire mon travail, alors que nous avons toujours été basés en Auvergne, et fiers de nos couleurs. »
Bernard Arnault, pour LVMH, qui a toujours maintenu un maximum d’emplois en France, a lui aussi sonné le tocsin. En Allemagne, Volkswagen s’apprête aussi à délocaliser ses usines. Une première !

De l’autre côté, certaines personnes sortant du chômage n’ont aucun intérêt objectif à retravailler. Bien sûr, on ne va pas bien loin en touchant le RSA, j’en conviens. Mais raisonnons froidement : le bénéficiaire du RSA perçoit en outre des aides et des allocations. Quand on regarde le revenu disponible d’une personne au RSA, il est très (trop) proche du Smic. Conséquence : un certain nombre de personnes, qui pourraient être des forces vives, entretiennent un rapport biaisé au travail, et ne se remettent pas assez rapidement sur le marché de l’emploi.
Je fais le même constat pour les clauses d’insertion. Elles sont amenées de façon artificielle. Beaucoup de signataires, qui cochent des cases (jeunes, issus de l’immigration, résidant dans des quartiers Politique de la Ville, etc.) repartent ensuite dans leurs difficultés, une fois leur contrat terminé. 

La réforme en cours de France Travail (qui consiste à rapprocher les publics éloignés de l’emploi du besoin des entreprises dans les bassins d’emploi, ndlr) ? Je pense que l’on se trompe de problématique. Ce n’est pas en aidant les gens de manière sociale que l’on va les rendre acteurs. Avec l’IA, France Travail devrait être la place de marché de l’emploi. Et je parle en connaissance de cause, Florian Mantione Institut RH étant, en tant qu’acteur de l’emploi et du recrutement, interfacé avec les syndicats professionnels et les associations économiques du territoire – nous sommes notamment fondateurs et mécènes de 60.000 Rebonds, parmi les premiers signataires de FACE Hérault, et membres du comité paritaire régional de l’Apec, en lien avec France Travail. 

Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, adopté par le Sénat le 24 février, prévoit de réduire certains allégements de charges sociales aux entreprises. Il s’agit encore d’une hausse des charges salariales, sur fond de baisses d’exonérations. Pour l’emploi, je prône une libération franche des entreprises, en allégeant les niveaux de charges, plutôt que de multiplier les allègements temporaires, avant de les raboter au gré des besoins budgétaires.

La solution passe aussi par une adaptation des droits au chômage. Ils devraient à mon sens être adaptés à la réalité du marché de l’emploi. Quand ce dernier tourne à plein régime, la durée d’indemnisation des demandeurs d’emploi devrait être réduite. 

Enfin, la libération des entreprises passe aussi par une libération du foncier d’activité. Je connais une PME de 80 salariés qui a cherché près de 10 ans avant de trouver une solution…

« Laissez faire les entreprises ! », martèle Patrick Martin, président du Medef. Je ne peux qu’y souscrire. Nous nous sommes enfermés dans une boucle qui est l’exact opposé de ce dont le marché a besoin. Il faut en sortir. D’urgence.  

Prochaine « Tribune partenaire » de Florian Mantione Institut RH : semaine du 19 mai

Vous souhaitez également faire paraître une tribune dans Les Indiscrétions ? Contactez-nous à amelie@agencehv.com et julie@agencehv.com