Assises de l’Économie de Montpellier Méditerranée Métropole : ce qu’il faut en retenir

20 novembre 2023
Assises du logement decodage
©Agencehv

Face aux bouleversements sociétaux, climatiques et économiques, « les entreprises doivent se transformer pour rester compétitives. Ce qui nous oblige, nous, collectivités, à changer nos paradigmes », insiste Michaël Delafosse, maire de Montpellier et président de Montpellier Méditerranée Métropole, lors des Assises de l’Économie, le 17 novembre, devant 600 décideurs et acteurs de l’écosystème entrepreneurial, au Corum de Montpellier. S’appuyant sur un diagnostic territorial réalisé par EY, la feuille de route de la métropole déploie cinq axes majeurs. Tout d’abord, le développement des stratégies de filières : santé globale avec MedVallée, un symbole de fertilisations croisées, énergies renouvelables, industries culturelles et créatives, numérique, art de vivre avec notamment le Pôle Vins, sport. L’emploi va être soutenu par des mesures concrètes : Bic (Business Innovation Centre) pour accompagner des porteurs de projets au cœur des Quartiers Politique de la Ville comme la Mosson – « Je souhaite abaisser le seuil de l’innovation, pour ceux qui sortent des écoles de commerce et de MoMa, mais aussi pour envoyer un message aux quartiers populaires. L’enjeu est très fort face au risque du communautarisme » -, expérimentation de la démarche Territoire Zéro Chômeur de Longue Durée, gouvernance locale France Travail…

Autre priorité, l’écologie, au cœur des politiques métropolitaines avec par exemple la mise en place de la gratuité des transports en commun pour les habitants, le 21 décembre. Cette mesure est aussi un vecteur d’attractivité pour les entreprises elles-mêmes, dans leurs recrutements. « Cet engagement se voit de l’extérieur, et est audacieux. Les territoires qui accélèreront sur leur engagement dans l’impact tireront leur épingle du jeu », explique Marc Lhermitte, consultant à EY. « Nous souhaitons créer un écosystème où les entreprises transforment leurs activités pour minimiser leur impact environnemental, où la responsabilité sociétale est une valeur fondamentale », affirme Hind Emad, vice-présidente déléguée au Développement économique et numérique. Toutes les entreprises seront embarquées dans l’aventure. Sachant que les plus petites sont aussi les plus nombreuses : 81 % des entreprises du territoire emploient moins de 9 salariés.

Le rééquilibrage territorial est une autre boussole. « Il y a un paradoxe terrible : à Montpellier, nous gagnons chaque année des habitants, et Lodève, située à seulement 50 km, en perd », compare Michaël Delafosse. Selon lui, le Zan (Zéro Artificialisation Nette) « pose certes un défi, mais doit être vu comme une opportunité. Avec notamment des projets de réinvestissement urbain pour des implantations d’entreprises ». Pour mieux répondre aux besoins de foncier économique, enjeu clé pour la création d’emplois, l’Agence de Développement et des Transitions, tout juste créée, regroupe ainsi 200 communes sur une grande aire urbaine d’un million d’habitants.

Passage à l’échelle. Des fiches actions, chacune dotées d’indicateurs d’atteinte d’objectifs, seront déclinées au cours du 1er trimestre 2024. Les enjeux-clés, selon Marc Lhermitte, sont « le passage à l’échelle des entreprises innovantes, pour que des start-up nées ici grandissent aussi ici », et l’engagement de l’écosystème « sur la voie de la transition, dont les piliers sont la biodiversité, l’économie circulaire et la décarbonation ». Autant de défis qui ne pourront être relevés « qu’avec une adhésion locale forte, et une évaluation continue de la démarche », conclut Laura Carmouze, maître de conférence en sciences de gestion à Aix-Marseille Université.

En CDD renouvelable. Une petite phrase n’est pas passée inaperçue. « Je suis là en CDD… en CDD renouvelable », a glissé Michaël Delafosse. On l’aura compris : il est candidat pour sa réélection en 2026. Pas une surprise, mais c’est dit.

Urbanisme commercial. Un schéma de développement de l’urbanisme commercial va être délibéré prochainement, « pour travailler sur les flux marchands. Un office du commerce va être créé, pour accompagner les porteurs de projets et accompagner des marques qui veulent s’implanter. La disparition de commerces dans certains quartiers, c’est du lien social de perdu, et des circulations automobiles en plus », indique l’élu.

Prime au vice. Matthias Navarro envoie un « plaidoyer auprès des politiques publiques. Il y a aujourd’hui une distorsion de concurrence, une sorte de prime au vice, un avantage compétitif à mal faire. Par exemple, cela coûte moins cher de produire des jeans en Chine qu’en France. Et l’entreprise qui fait l’effort de produire en France a pourtant le même niveau de charge, de TVA, de fiscalité… Aujourd’hui, les entreprises qui s’engagent le plus sur leur impact sont celles qui prennent le plus gros risque pour leur compétitivité. Idem dans la construction et la rénovation : c’est plus cher de travailler avec des matériaux recyclés qu’avec des matériaux neufs, livrés depuis l’étranger. Pourtant, le réemploi de matériaux est plus vertueux sur le plan environnemental ». Avec Impact France, il pousse les pouvoirs publics, « dont les métropoles et EPCI », à aider les entreprises « de façon ciblée », en fonction des efforts qu’elles consentent, à travers un Impact Score.

RSE : le rôle des grandes entreprises et la stratégie des petits pas. Dans la mise en place de la RSE dans les TPE, « les grandes entreprises ont un rôle d’acculturation à jouer. Elles doivent travailler avec les TPE sur ces points », insiste Christèle Martinez, directrice du développement d’EDF Occitanie. Avant de s’embarquer dans des labels ou statuts ambitieux (entreprise à mission, Bcorp), elle conseille de réfléchir d’abord « à ce vers quoi on doit tendre. Tout le monde n’a pas les moyens ni les ressources pour s’engager dans. une démarche d’entreprise à mission. Il est préférable de commencer par des groupes de travail, autour de la croissance responsable, de la marque employeur, débouchant sur des actions collectives ».

Tourisme social. Hugo Alvarez, pour Atout France (et, pour l’anecdote, néo-Montpelliérain), insiste sur l’importance, pour un territoire touristique et littoral comme celui du Grand Montpellier, de réfléchir à l’avenir de son tourisme de masse. « La Mission Racine, dans les années 60 et 70, a inventé le tourisme de masse. C’est une promesse très française : faire un break en famille, à travers des comités d’entreprise notamment. Comment, aujourd’hui, faire en sorte que ce tourisme social ne soit pas désagrégé ? Quelles expériences offrir aux familles ? L’attractivité touristique ne doit-elle être réservée qu’aux plus riches ? »

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