Logement social : l’alerte et les propositions de HSO Occitanie

5 février 2024
HSO
De gauche à droite : Philippe Martin (FDI Habitat), Gilles Dupont (Hérault Logement), Michel Calvo (ACM Habitat et président de HSO), Vanessa Lebel (Sète Thau Habitat), Alain Braun (ACM Habitat), ce 1er février au Club de la Presse à Montpellier. ©Hubert Vialatte.

Moins d’offres, mais plus de demandeurs. Le 1er février, lors d’un point presse, Michel Calvo, président de Habitat Social en Occitanie, alerte sur « le franchissement du cap des 200.000 demandeurs de logements locatifs sociaux (LLS) en région (189.000 en janvier 2024). Cette hausse du nombre de demandes révèle une crise des revenus des ménages, qui stagnent. Or, en face, la programmation de LLS a baissé l’an dernier de 12 % ». La construction de logements locatifs sociaux est à son plus bas niveau depuis 2008, avec 9.241 LLS programmés en 2023. Selon HSO, la programmation de LLS est en retrait en Occitanie « de 16 % par rapport aux objectifs. Chaque année, ce sont plus de 5.000 LLS qui font défaut en Occitanie ». Selon Michel Calvo, « l’appareil de production est cassé. Ce qui veut dire que, dans 3 ou 4 ans, des dizaines de milliers de personnes ne trouveront pas plus de logements sociauxNous anticipons une crise phénoménale en 2026 et 2027 ».

Abandon d’opérations. De plus, « toutes les opérations programmées n’iront pas au bout. Il y a une série d’incertitudes, sur les chantiers notamment avec les défaillances des entreprises de construction, pour le foncier… » « Sur un chantier d’ACM Habitat, quatre entreprises se sont retrouvées en procédures collectives », illustre Alain Braun. Les organismes font face à des taux effectifs globaux de 4 à 4,5 %. « Ce taux pèse sur la programmation des organismes. Beaucoup prennent la décision de différer des opérations, en attendant un repli des coûts de construction et/ou une baisse des taux d’intérêt. Tous les bailleurs sont guettés par des budgets en négatif. Le gouvernement fait comme si la branche n’était pas en crise, mais l’État prélève plus que ce qu’il apporte au financement de la branche du logement social. »

Décroissance. Les bailleurs sociaux présents font état de perspectives décroissantes : 200 livraisons en 2024 pour FDI Habitat, au lieu de 300 en 2023 ; 130 livraisons en 2024 pour Hérault Logement, au lieu de 220 en 2023. « Et il manque de l’hébergement d’urgence, signale Michel Calvo. Dans les grandes métropoles, on commence à voir des femmes seules avec enfants, ou des femmes battues, à la rue. » Dans ce contexte, ACM Habitat entend atteindre son objectif de 1.000 logements par an à partir de 2026, soit trois fois plus que 2023. « Nous avons des fonds propres assignés. Tous les organismes membres de HSO ne sont pas dans notre situation », tempère Michel Calvo.

Valse des ministres. Dans une situation du logement « dégradée comme jamais », la valse des ministres du Logement (trois en trois ans), et le fait qu’il n’y ait pas de ministre du Logement depuis la nomination de Gabriel Attal à Matignon, sont autant de signaux mal perçus par le monde HLM. « À Bercy, le ministre (Bruno Le Maire, note) n’a pas bougé depuis 7 ans », ironise Michel Calvo.

Taux de rotation au plus bas. Par ailleurs, le taux de rotation s’effondre (8,9 %), ce qui congestionne les attributions de logements. Le taux de rotation est particulièrement faible dans l’Hérault (6,8 %), les Pyrénées-Orientales (8 %) et le Gard (8,8 %). « Pour mon territoire, le taux de rotation s’effondre à 5 %, au lieu de 10 % auparavant. C’est un vrai enjeu, pointé par la Fondation Abbé Pierre », souligne Vanessa Lebel. « Le système est embolisé : on ne construit pas, il n’y a pas de stock, et on observe une baisse du taux de rotation. Cela va durer. Un logement qui n’est pas programmé aujourd’hui, c’est une famille sans logement dans trois ans », illustre Gilles Dupont.

Solutions. Parmi les solutions proposées par HSO, pour débloquer les freins à la construction : abroger la RLS, qui « a asséché les trésoreries des bailleurs », souligne Michel Calvo ; Revenir à une TVA à 5,5 % pour tous types de travaux ; Favoriser, pour les organismes de logements sociaux, l’accès à des ressources foncières de l’État, à prix maîtrisés. Pour accélérer la massification de la rénovation énergétiques du parc de LLS, HSO propose l’ouverture d’une partie du dispositif MaPrimeRénov’ au logement social, l’explicitation au monde HLM des modalités et conditions d’accès aux 1,3 Md€ dédiés à la réhabilitation sur trois ans, le maintien d’une diversité de soutiens financiers pour les organismes, « en particulier les fonds européens via les Régions ». Enfin, l’association préconise une revalorisation des APL en tenant compte de l’inflation. Pour l’USH, à l’échelle nationale, le discours de politique générale du Premier ministre Gabriel Attal apporte des réponses « insignifiantes face à l’ampleur de la crise ». Michel Calvo y voit « l’intention de détricoter une partie de la loi SRU, en envisageant de l’ouvrir au financement libre. Cela reviendrait à dire à tous les préfets qui se sont battus sur le terrain : ‘Ce que vous avez fait ne compte plus’ ».

SRU : l’ex-LR mauvais élève. En 2022, la région Occitanie compte 182 communes concernées par la loi SRU, dont 162 communes non exemptées. 9 % de communes SRU sont carencées, la quasi-totalité étant basées en Occitanie Est. La carte des communes SRU disponible en cliquant ici.

Réforme des attributions : « une bombe ». La réforme des attributions « est une bombe, en étant dérogatoire au Dalo (droit au logement opposable), ou encore au pouvoir des préfets sur les publics prioritaires », indique Michel Calvo. « Aujourd’hui, la commission d’attribution est collégiale, et le maire y a déjà une voix prépondérante. Si la réforme revient sur la notion de collégialité, on émettra alors des interrogations. Comment quelqu’un de seul pourrait-il décider des attributions ? À force de toucher à un certain nombre de paramètres, on remet en cause le modèle même du logement social : répartition des logements, production, financement, processus d’attribution… », conclut Gilles Dupont.

325.000 logements sociaux sont répartis en Occitanie, abritant 690.000 habitants (11 % de la population totale régionale). Ce secteur représente 2 Md€ d’investissements annuels en région, et 35.000 emplois directs ou induits.

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